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Archives de décembre, 2019

« Demeure » « Pour échapper à l’ère du mouvement perpétuel »

À l’ère du changement accéléré et du mouvement permanent, Françoix-Xavier Bellamy auteur du livre « Demeure », pose un regard philosophique sur l’enjeu de recouvrer des repères pérennes pour orienter et qualifier nos vies.

Qu’est ce qui disparaît et qu’est-ce qui perdure ?
Historiquement la question n’a cessé d’être posée depuis le combat entre les partisans de l’être (Parménide) et les théoriciens du flux, du devenir (Héraclite). Ce dernier semble l’avoir emporté : pourtant si « on ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve », celui-ci obéit à une nécessité inchangée : trouver la mer et s’y fondre.

La révolution copernicienne de la Renaissance a balayé la vision médiévale d’une Terre statique au centre d’un univers clos : la reconnaissance du mouvement de la Terre et de tous les corps célestes a ouvert la conscience humaine au besoin d’exploration de nouveaux espaces intérieurs et extérieurs. Ce mouvement incessant serait une des racines de la mondialisation où l’attrait du lointain pallie la difficulté croissante à vivre l’ici et maintenant.

La modernité ou le progressisme érigé en norme

On peut la définir comme une fuite en avant, une table rase du passé qui considère que tout ce qui va advenir dans le futur sera nécessairement meilleur que par le passé.
Cette ligne de tension à sens unique est soutenue par un optimisme de principe sans but défini.  Le rapport au temps, réduit à sa seule dimension d’immédiateté, nourrit paradoxalement une incapacité à vivre le présent. On retrouve cette passion de l’instantanéité dans les moyens de communication virtuels qui enferment dans l’illusion d’un savoir éphémère et dans la logique du tout jetable. Comme disait Machiavel, l’important est « d’être d’accord avec l’époque ».

Montaigne écrivait aussi : « je ne peins pas l’être, je peins le passage. […] Il faut accommoder mon histoire à l’heure ». La tyrannie des modes traduit bien ce besoin conformiste de n’être attaché à rien. Qui plus est, l’absence de critères identitaires communs reconnus et acceptés a généré une nouvelle forme d’anxiété qui est la peur du déclassement et du remplacement.

Déjà au XIXe siècle, Nietzsche exprimait son ressentiment à l’égard d’une société impuissante à vivre le réel ; mépris du réel que l’on retrouve dans les théories actuelles du transhumanisme selon lesquelles l’homme est à augmenter  continuellement : quand l’existence humaine est une finalité en soi et qu’on ne reconnaît aucun repère fixe vers lequel tourner ses aspirations, pourquoi se donner des limites ? « La modernité s’accomplit  dans la déconstruction […] des distinctions qui imposaient un renoncement ». En revanche nous sommes invités à « nous réconcilier avec cette vie marquée par l’expérience des limites ».

 Être mobile ou demeuré

Sur cette trajectoire linéaire, deux réponses possibles : une qui regarde vers le passé, ou « sophisme naturaliste », principe dont la seule rationalité  serait de consentir à ce qui est. Et l’autre tournée vers l’avenir,  ou « sophisme progressiste » ou consentement d’emblée à ce qui sera. Leur point commun étant d’être des sophismes, c’est-à-dire des approches de la réalité utilisant les pièges du raisonnement pour nier tout fondement à une vérité une et stable.
La seule option possible se résume à  « être mobile ou demeuré » selon la belle formule de François-Xavier Bellamy. Le caractère péjoratif du mot demeuré, synonyme de simple d’esprit, montre bien  le discrédit jeté sur l’idée de demeurer, de se situer dans un espace stable. Or « Ce qui rend possible le mouvement de toute vie et ce qui lui donne  un sens, c’est toujours ce qui demeure ». Nous en sommes donc réduits à choisir artificiellement notre camp entre ceux que David Goodhart (1) appelle les  anywhere  (les gens de n’importe où et donc de nulle part ) et les somewhere (les gens de quelque part). Les anywhere appartiennent plutôt aux classes moyennes aisées éduquées qui tirent profit de la mondialisation ; monde inquiétant pour les somewhere, généralement de condition plus modeste, attachés à un terroir et à un héritage culturel.

Habiter en soi pour habiter le monde

Cette opposition artificielle a généré une crise de la transmission : mais un arbre devrait il choisir entre ses racines et son besoin de croissance, d’expansion? (La philosophe Simone Weil présente l’enracinement comme un besoin fondamental de l’âme humaine, avec ses deux facettes : sécurité de l’ancrage dans un point fixe et risque d’aller vers l’inconnu.)

La demeure inclut l’idée d’une qualification, d’un temps, d’une appropriation d’un espace qui devient le foyer (home en anglais), lieu de rencontre et de reconnaissance chaleureuse. Les constructions modernes à caractère utilitaire ne peuvent répondre au besoin légitime de se rencontrer soi-même et de rencontrer l’autre. Et il n’est point de reconnaissance de l’autre sans conscience du soi. Il est vital d’avoir un chez-soi, même sommaire comme en ont témoigné certains SDF qui préfèrent encore la précarité de la rue avec leurs repères habituels à l’anonymat d’un confort relatif en foyer d’accueil. Nous avons le pouvoir de prendre soin de notre environnement pour le transformer.

Retrouver le sens de la proximité

Ce besoin de récupérer un temps long  a déjà été soulevé il y a un siècle par Gandhi dans son ouvrage majeur, Hind Swaraj (2) : il y dénonce l’accélération due aux nouveaux moyens de transport qui ne permettent  pas à la conscience d’assimiler les changements extérieurs et est source d’angoisse. Nous devons réapprendre à marcher lentement pour voir, comme Le Petit Prince de Saint-Exupéry, qui prend le temps de cheminer vers une source.

Retrouver la valeur des choses

Dans un même ordre d’idée, l’économie que l’on peut définir comme le système de maintenance, de circulation et de préservation des ressources, est passée de la valeur d’usage (qualité propre à l’objet qui le rend unique) à une simple valeur d’échange : tout a un coût, tout s’achète. Cette économie des flux a mis en crise tous les ordres établis dont celui de la Nature : dans une logique du tout jetable, on est passé « de l’amour du chef-d’œuvre à l’obsolescence programmée ». Plus rien n’est singulier,  jusqu’à la marchandisation du lien social. Le modèle de la start up, vecteur de nouveauté s’impose, alors que l’idée d’État (stat = ce qui perdure) comme fondement d’une communauté humaine sur des valeurs partagées s’estompe.
Pourtant la vie mérite d’être contemplée si nous savons reconnaître les biens inaltérables pour les transmettre. L’auteur nous propose de « passer  des chiffres aux lettres » car «si  le sens des mots se trouve dans la constance de la vérité qu’ils touchent,  une œuvre classique est indémodable. »

Ainsi L’Odyssée d’Homère continue-t-elle d’enchanter des générations de lecteurs : la nostalgie d’Ulysse, aspirant après de glorieuses conquêtes à retrouver son environnement familier, son foyer, son épouse Pénélope et ses proches qui lui sont restés fidèles, résonne comme le retour du héros, dernière phase de toute épopée. Toute quête doit finir par trouver son objectif, son sens. « Nous devons tous retrouver notre Ithaque », notre  cœur vital, la racine immuable qui nous confère dignité et sens de la destinée.

(1) Journaliste, économiste et écrivain britannique né en 1956 et auteur entre autres de The Road to Somewhere: The Populist Revolt and the Future of Politics, Éditions C. Hurst & Co, 2017,  traduit en français par Les Deux clans : La nouvelle fracture mondiale, Éditions Les Arènes, 2019, 400 pages
(2) Lire les articles sur Gandhi parus dans les revues Acropolis :
– 306 (avril 2019) : Mahatma Gandhi, héros universel,  guerrier de la paix par Dominique Béchu
– 310 (septembre 2019) « Hind Swaraj », le livre révolutionnaire de Gandhi par Isabelle Ohmann
– 311 (octobre 2019) : Ne laissons pas périr l‘homme ! La réponse de Gandhi par Fernand Schwarz
– 311 (octobre 2019) : Gandhi, guerrier de la paix des temps modernes, par Virginie Dujour
– 313 (décembre 2019) : Hommage à Gandhi, le guerrier pacifique du XXe siècle par Marie-Agnès Lambert
Les citations ci-dessus sont extraites de Demeure, pour échapper à l’ère du perpétuel mouvement, de François-Xavier Bellamy, Éditions Grasset, 2018, 272 pages, 19 €
(N.D.L.R.) : Nous citons cet ouvrage pour son intérêt philosophique sans adhérer à l’engagement politique de l’auteur.
par Sylvianne CARRIÉ

  • Le 24 décembre 2019
  • Littérature
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Une autre fin du monde est possible

La perspective d’un effondrement de notre civilisation à l’échelle planétaire implique une monumentale remise en cause de nos modes de vies – et plus encore : du regard que nous portons sur la vie ! Comme il est peu probable qu’un sursaut global des consciences mène, dans les années à venir, à un revirement collectif pour organiser la décroissance de nos sociétés, il faut se préparer à vivre dans un monde beaucoup plus dur que celui que nous connaissons aujourd’hui.

Toutefois, le pire peut devenir le meilleur si nous savons tourner les choses du bon côté. C’est l’avis de Pablo Servigne, Raphael Stevens et Gauthier Chapelle dans ce livre Une autre fin du monde est possible (1), paru en 2018, soit trois ans après la sortie de leur premier livre Comment tout peut s’effondrer (2) que nous avons présenté dans la précédente revue Acropolis. (3).

Nous sommes allés trop loin : le réchauffement climatique, l’extinction de la biodiversité, la pénurie des ressources énergétiques et minérales, la pollution… Pour les collapsologues, il n’est plus question de « développement durable » ou de « croissance verte ». Les mots « croissance » et « développement » doivent être définitivement abandonnés. Quand bien même l’humanité se brancherait sur un réservoir d’énergie infini, elle ne ferait qu’accélérer son mouvement irrésistible d’exploitation de la nature qui conduit, aujourd’hui, à la sixième extinction de masse des espèces vivantes, avec toutes les conséquences que cela comporte sur notre capacité, non seulement à cultiver la terre pour nourrir nos estomacs, mais à cultiver nos imaginaires pour nourrir nos esprits au contact des mystères de la nature sauvage.

Il n’y a pas de « solution »

Face à l’effondrement inéluctable de nos sociétés, il n’y a pas de « solution » – sous-entendu : pas de solution pour sauver la croissance et le développement matériel de nos sociétés. C’est un changement complet de paradigme qui implique d’abandonner l’espérance que tout continuera plus ou moins comme avant. Selon les auteurs du livre, ce changement de paradigme implique une immense « réconciliation ». Tout d’abord, il s’agit de se réconcilier avec notre intériorité. Face au bouleversement que représente un effondrement de civilisation, nous devons être capables d’exprimer nos émotions et de reconsidérer la question de la spiritualité – qui n’est pas la même chose que la religion. Nous avons besoin de l’intuition, non pas pour rejeter la raison aux oubliettes (ce qui serait une démarche obscurantiste), mais pour équilibrer deux modes de pensées tout aussi nécessaires l’un que l’autre. Notre époque se pense rationaliste, mais si on y réfléchit bien, rien n’est plus irrationnel que de piller en toute connaissance de cause la planète que nous lèguerons à nos enfants. La raison sans l’intuition n’est plus la raison : c’est un intellect fou incapable de se remettre en cause. Voilà le drame de notre époque.

Oser l’ouverture

Ainsi, nous avons tout intérêt à ouvrir nos esprits « soi-disant rationnels » à d’autres visions du monde, en particulier les visions des peuples « soi-disant primitifs », lesquels ne se séparaient pas de la nature. C’est certainement la clé pour sortir de la crise : se reconnecter à la nature, cultiver le sentiment d’unité avec tout l’univers, de fusion avec le « Grand Tout », de lien intime avec quelque chose qui nous dépasse. Cela s’appelle le « sacré » – un mot avec lequel nos sociétés sont bien souvent fâchées, mais qui est pourtant au cœur de l’immense et nécessaire reconfiguration de nos schémas mentaux. Le sacré consiste à donner un sens aux choses au-delà de leur aspect utilitaire. Il ne s’agit pas, comme c’est le cas malheureusement dans beaucoup de religions traditionnelles, d’ancrer nos vies dans une longue succession de rites plus ou moins mécaniques, mais de remonter à la source de la spiritualité qui cultive la beauté et s’exprime dans des valeurs telles que la gratitude et l’humilité. Cette attitude est la seule qui puisse nous permettre de rétablir les quatre liens fondamentaux : avec nous-mêmes, avec les autres, avec la nature et avec le transcendant.

Voie extérieure et intérieure

Prenons garde toutefois aux revirements trop hâtifs ! – Le nouveau paradigme proposé implique de dépasser les oppositions classiques. Face à l’effondrement, il y a deux grandes voies : la voie « extérieure » qui consiste à se préparer matériellement à un monde contraint en ressources, et la voie « intérieure » qui consiste à se retrouver au centre de soi-même pour commencer un cheminement spirituel de détachement. Chacun aura tendance à emprunter une voie plutôt qu’une autre, ce qui n’empêche pas, bien au contraire, les coopérations. Réconcilier militants et méditants fait partie des principaux enjeux.

S’initier

Inspirés par les rencontres bouleversantes qu’ils ont faites ces dernières années, les auteurs du livre nous expliquent ce qu’est une « initiation ». Il s’agit d’établir une nouvelle relation avec tout ce qui nous entoure tout en se réalisant soi-même. D’après Carl G. Jung, les passages initiatiques proposent un modèle d’évolution personnelle enraciné dans les cycles de la nature. C’est la raison pour laquelle la part congrue que nous avons réservé à la nature sauvage pose tant problème. L’homme civilisé a démesurément étendu la sphère de son « connu » au détriment de « l’inconnu » qui permet de réveiller en soi l’être connecté à tout ce qui existe. C’est la relation du masculin au féminin, en particulier, qu’il s’agit de se réapproprier à travers l’initiation, car il y a un parallèle évident entre le sort que les hommes font subir aux femmes depuis des siècles et celui que nous infligeons aujourd’hui à la nature.

Inventer de nouveaux récits

Le basculement de posture ne se fera pas tout seul. Nous avons besoin d’inventer de nouveaux récits, de nouveaux mythes, afin de redonner un sens à la vie et de rendre « désirables » les changements nécessaires. Face à la menace d’un effondrement, on pourrait croire que l’urgence est d’agir, encore et encore, mais ce serait oublier ce qui, précisément, a mené l’humanité au désastre : un manque de recul, une obsession du faire et de l’avoir sur le contempler et l’être. Tout se passe d’abord dans l’invisible. C’est pourquoi nous avons besoin de nous raconter des histoires pour bâtir notre futur. C’est tout un système socioéconomique et culturel qui est à réinventer. Le fonctionnement vertical et centralisé de nos gigantesques sociétés actuelles n’est pas adapté au monde de demain qui verra émerger des myriades de petites sociétés résilientes. Il nous faudra réapprendre à vivre en communauté, avec tout ce que cela implique d’intégration de la logique de l’interdépendance et d’abandon des réflexes égoïstes qui ne peuvent proliférer que dans un monde débordant de richesses matérielles.

L’entraide

Les auteurs insistent beaucoup sur la notion de l’entraide, de l’accueil de l’étranger plutôt que du repli sur soi, car nul ne sait comment se passera l’effondrement. Riches comme pauvres, nous sommes tous de potentiels migrants. Soyons accueillants pour être mieux accueillis ! Ce qui distingue l’effondrement en cours des effondrements précédents, c’est sa dimension : mondiale et non plus locale. La situation est inédite et aura des conséquences bien au-delà de ce que nous pouvons imaginer. C’est pourquoi, sans cesser de nous mettre en mouvement et d’inventer de nouveaux récits, nous devons rester humbles, à l’écoute, ouverts, pour que les temps difficiles ne deviennent pas la fin des temps.

Avoir le sourire quand tout s’effondre

Une autre fin du monde est possible. Cela ne veut pas dire que nous avons les moyens d’empêcher l’effondrement. Cette idée de « solution possible » doit être bannie de nos esprits, car illusoire et déconnectée de la réalité du problème. Plus nous persévérerons dans notre modèle de croissance économique infinie, plus nous chuterons de haut. C’est le message fracassant et enthousiasmant de ce livre : il n’y a pas de sortie de crise possible sans changement de posture intérieure. Nous avons l’opportunité de nous reconnecter à l’essentiel, de reconsidérer la place de l’humain dans le monde. Qui a déjà parlé à un arbre ? Qui sent, lors d’une balade, ce qu’a à dire la forêt ? – Nous sommes invités à nous décomplexer vis-à-vis de ces comportements un peu fous, mais tellement beaux, qui rendent possible la grande réconciliation de l’homme et du vivant.

(1) Une autre fin du monde est possible – Vivre l’effondrement (et pas seulement y survivre), Pablo SERVIGNE, Raphael STEVENS et Gauthier CHAPELLE, Édition Seuil, Collection Anthropocène, 2018, 323 pages
(2) Comment tout peut s’effondrer Petit manuel de collapsologie à l’usage des générations présentes, Pablo SERVIGNE et Raphael STEVENS, Édition Seuil, Collection Anthropocène, 2015, 304 pages
(3) Lire l’article de Fabien AMOUROUX, Comment tout peut s’effondrer, paru dans la revue Acropolis N° 313 (décembre 2019)
par Fabien AMOUROUX

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Il est encore possible d’aimer

Le mythe est effondré : adieu (h)Eros, Aphrodite est engloutie par les flots. La vision moderne de l’amour est elle aussi en crise.

Qui penserait encore aujourd’hui que le bonheur en couple peut être durable ?
Dans les années 90, il y avait chaque année 155 000 séparations de couples en moyenne. Quinze ans plus tard, dans les années 2010, le nombre des séparations est de 253 000 par an, soit une augmentation de 63% (1). La durée moyenne d’un mariage est de 15 ans, et le cap entre 4 et 6 ans, celui qui cumule le plus haut taux de divorce (2).

N’ayons pas honte, nous avons parfois été ce couple errant. Et pourtant, nous le fuyons. La génération Y (née entre 1980 et 1999), cherche à éviter le modèle de ses parents, au mieux divorcés, au pire indifférents l’un à l’autre. Certains couples périssent d’usure, des « Je t’aime » perdus et des sourires ravalés.

Assumer le conflit… par amour

Pour cela, la génération Y engage ou relie davantage de relations avant de s’engager. La relation à l’autre est une manière de se connaÎtre, mais le risque est celui du papillonnage : arrêter de tenir bon face aux inévitables difficultés, voire les ignorer.
Bien souvent, pas peur de perdre l’autre, nous évitons le conflit et laissons filer les petites choses, les détails. Des cailloux dans la chaussure. Aimer est une danse, d’autant plus harmonieuse en ôtant les cailloux. La langue de bois n’a jamais su dire des mots d’amour. La relation intime est un parfait terrain pour apprendre à aborder les conflits, les dégonfler comme un ballon, en communiquant. Assumer le conflit est une preuve d’amour : c’est chercher à retrouver l’harmonie avec l’autre, par-dessus notre peur. Les grands amoureux sont ceux qui ne baissent pas les bras. Orphée ira jusqu’aux enfers pour faire renaÎtre son amour, Eurydice.
Il faut du courage. Courage et amour sont indissociables. « Courage » ne vient-il pas d’ailleurs du mot « cœur » ?

 

« Touché par l’amour, tout homme devient poète. » Platon

Cela dépasse le couple : aimer c’est un débordement en soi qui touche les autres, et qui les inclue, qui nettoie les calculs triviaux et les comptes d’intérêt. C’est un lien étroit avec la générosité car elle aussi vient du cœur.
C’est une lutte quotidienne que de garder son cœur ouvert face aux difficultés, aux différences, aux incompréhensions… Mais quelle lutte admirable ! De celles qui rendent l’être humain. Nietzsche disait « Qu’est-ce donc que l’amour, si ce n’est de se comprendre et de se réjouir en voyant quelqu’un d’autre vivre, agir et sentir différemment de nous, parfois même à l’opposé ? » (3).
Chaque jour où nous refusons de faire une place à la différence de l’autre en nous, nous fermons la porte du cœur au risque de sécher, ternir, nous automatiser. Au risque de devenir de petits hommes aux yeux vieux couleur trottoir. Quand on a le cœur fermé, tout s’affadit, et aucun plaisir passager ne saurait rallumer la flamme.
Accepter d’aimer est un choix. N’attendons pas qu’un sentiment de trop tard nous saisisse devant la mort. Ne laissons pas sécher irrémédiablement le cœur comme un terrible fruit sec. Il est encore possible d’aimer. Comme le Petit Prince (4), nous y invite, prenons soin de la rose du cœur : « elle est plus importante que vous toutes, puisque c’est elle que j’ai arrosée. Puisque c’est elle que j’ai mise sous globe. Puisque c’est elle que j’ai abritée par le paravent. Puisque c’est elle dont j’ai tué les chenilles (sauf les deux ou trois pour les papillons). Puisque c’est elle que j’ai écoutée se plaindre, ou se vanter, ou même quelquefois se taire. Puisque c’est ma rose.

(1) Source : Étude INSEE 2011
(2) Source : étude INSEE Première sur les divorces 2014
(3) Extrait de Humain trop humain de Friedrich Nietzsche, Éditions Livre de poche, 1995, 768 pages
Lire également Nietzsche, la quête d’éternité par Fabien Amouroux, Éditions Ancrage, 2017 96 pages, 8 €
https://www.nouvelle-acropole.fr/ressources/editions/200-nietzsche-la-quete-d-eternite
(4) Œuvre de Antoine de Saint-Exupéry, Éditions Gallimard, 2007, 120 pages
Lire également Le Petit Prince, un voyage philosophique entre Ciel et Terre, par Olivier Larrègle, Éditions Ancrage, Collection Petites conférences philosophiques, 2019, 100 pages, 8 €
https://www.nouvelle-acropole.fr/ressources/editions/245-le-petit-prince-un-voyage-philosophique-entre-ciel-et-terre.
Lire
L’alchimie du couple, Sept clés pour le bonheur par Laura Winckler, Éditions Cabédita, 2017, 167 pages
Par Audrey EG

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